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Derrière les crédits plastique, l'incinération des déchets
Deux fois par jour, les sirènes de la cimenterie Chip Mong Insee au Cambodge retentissent, signe que des explosifs vont arracher à la montagne le calcaire destiné aux fours de l'usine qui carbure aux déchets plastiques.
Il faut visiter le village de nuit pour voir s'échapper la fumée blanche des cheminées. Mais de jour, les habitants peuvent observer la poussière recouvrir les alentours. Ils accusent l'usine des maladies respiratoires apparues depuis qu'elle tourne à plein régime.
Perdue dans le sud du Cambodge, dans le village de Touk Meas, cette cimenterie est un maillon discret mais typique d'un nouveau secteur très prisé des grandes entreprises: les crédits plastique.
En voici le fonctionnement: une entreprise, qui vend des produits de grande consommation emballés dans du plastique, paie un intermédiaire pour la collecte et la gestion de déchets plastiques, dans une démarche présentée comme responsable. Un crédit acheté signifie généralement une tonne de déchets plastiques collectés.
Idéalement, ceux-ci sont ensuite recyclés. En réalité, la plupart sont tout simplement brûlés comme combustible, sans grande précaution pour la santé des habitants, comme dans la cimenterie Chip Mong Insee.
Une enquête de l'AFP et du site SourceMaterial (une organisation à but non lucratif qui regroupe des reporters spécialisés dans les investigations sur le changement climatique, la corruption et la démocratie) montre que le système des crédits plastique, promu pour réduire la pollution et doper le recyclage, repose largement sur une industrie plus polluante que l'aviation: les cimenteries où finissent incinérées des quantités industrielles de déchets liés à ces crédits.
"Les habitants paient le coût et les entreprises récoltent les bénéfices", estime Miriam Rotkin-Ellman, experte technique pour l'organisation Environmental Justice Health Alliance for Chemical Policy Reform (EJHA). "Le divorce est total entre ceux qui subissent et ceux qui profitent."
Une demi-douzaine d'habitants interrogés par l'AFP à Touk Meas en janvier décrivent les mêmes symptômes depuis l'entrée en service de la cimenterie en 2018.
"On tousse souvent", confie Pheara, qui ne souhaite pas révéler son nom comme la plupart des personnes interrogées localement. "Avant, quand on tombait malade, peu de médicaments suffisaient. Maintenant pour se soigner, il faut en prendre à plusieurs reprises et consulter différents médecins."
La cimenterie a certes apporté des emplois aux villageois mais elle a détérioré leurs conditions de vie. "Je ne veux plus vivre ici, il y a tellement de poussière", poursuit Pheara. "Mais qui achètera ma maison ?"
- "Solution paresseuse" -
Personne ne conteste l'énormité du problème : au moins 22 millions de tonnes de plastique se sont déversées dans l'environnement en 2019 selon l'OCDE. Et les quantités augmentent.
Ce problème se concentre dans les pays pauvres comme le Cambodge, où le ramassage et le tri des déchets sont insuffisants ou inexistants. Les rues cambodgiennes, les champs, les cours d'eau vomissent de plastique.
Ce sont ces déchets que les inventeurs des crédits plastique ciblent.
Ils proposent aux multinationales de produits de grande consommation, comme Colgate-Palmolive, PepsiCo ou Mondelez, de leur vendre des crédits équivalant à un certain nombre de tonnes de déchets traités. Les groupes pourront dire qu'ils ont compensé leur empreinte plastique.
Mais le secteur, concentré en Asie, en Amérique latine et en Afrique, n'est encadré par aucune norme universelle. Les projets sont certifiés par des auditeurs privés sans contrôle des autorités.
L'engouement est cependant réel : le marché pourrait atteindre 4,2 milliards de dollars en 2050, selon BloombergNEF.
C'est "une solution très, très paresseuse", juge Piotr Barczak du réseau ACEN (African Circula Economy Network). "Elle permet aux entreprises productrices de plastique de perpétuer leur modèle économique."
Les vendeurs de crédits plastique admettent que rien, dans ce système, n'oblige les entreprises à réduire leur recours au plastique. Mais ils notent que la démarche leur coûte de 140 à 670 dollars par tonne, ce qui pourrait les motiver financièrement à consommer moins de plastique.
"A partir d'un certain niveau, il y aura une incitation économique à agir davantage", veut croire Sebastian DiGrande, directeur général du registre de crédits plastique PCX Markets.
- "Personne ne contrôle" -
Pour faire du ciment, la technique traditionnelle consiste à cuire du calcaire à plus de 1.000°C, une température généralement atteinte en brûlant du charbon. Dans la cimenterie cambodgienne, le charbon est en partie remplacé par du plastique, dont les cendres sont ensuite utilisées dans la composition du ciment.
Selon une analyse des données de quatre grandes places de marché de crédit par l'AFP et SourceMaterial, un quart seulement des crédits vendus concernent des projets qui recyclent les déchets. Pour plus des deux tiers des crédits, le plastique finit incinéré.
Les promoteurs se défendent en rappelant que tous les plastiques ne sont pas recyclables, des déchets pouvant être trop contaminés ou mélangés.
Contrairement aux pays riches, les contrôles sont très limités dans les pays en développement, explique Jorge Emmanuel, spécialiste de l'environnement et de la santé à l'université Silliman aux Philippines.
"Il y a souvent des lois, mais elles peuvent être totalement ignorées, faute de contrôles", dit-il. "Personne ne contrôle les rejets."
Les très hautes températures des cimenteries sont censées empêcher le rejet de polluants organiques persistants comme les dioxines cancérigènes ou les "polluants éternels" (PFAS).
Mais à l'allumage des fours ou durant le refroidissement, ou bien quand des combustibles différents sont ajoutés, des dioxines peuvent être produites et s'échapper, selon Jorge Emmanuel.
"Dès qu'on introduit des déchets (...) on apporte de nouveaux cocktails de contaminants", explique Lee Bell du réseau d'ONG International Pollutants Elimination Network. Et les filtres des cimenteries ne sont pas conçus pour les piéger.
Près de la cimenterie, le petit café de Kongthy, 56 ans, est régulièrement envahi par une odeur de plastique brûlé. Elle-même ne boit plus l'eau de pluie, montrant la poussière omniprésente. "On n'ose pas la collecter. On boit de l'eau en bouteille."
Même lorsqu'elles fonctionnent uniquement au charbon, les cimenteries créent des risques sanitaires, rappelle l'Agence américaine de protection de l'environnement. Notamment des cancers, des problèmes cardiovasculaires et pulmonaires, et des risques pour les foetus, énumère Miriam Rotkin-Ellman.
- Mieux que rien? -
A Touk Meas, les ouvriers de la cimenterie disent être rassurés par une visite médicale annuelle et leurs équipements de protection.
Ils confirment que l'usine brûle du plastique mais aussi des huiles usagées, des vêtements, des sacs en plastique et même des bouteilles en plastique, pourtant l'un des objets les mieux recyclables.
"Ils ont des filtres", explique Vork, un opérateur. "Cela n'a rien à voir avec une incinération en plein champ."
Le plastique que les fours incinèrent est livré par Tontoton, une société qui vend des crédits à des entreprises dont Celebrity Cruises et le cabinet EY.
Ni Chip Mong Insee ni Tontoton, ni Celebrity Cruises ou le cabinet EY n'ont répondu aux questions de l'AFP.
Ces crédits-là sont vendus sur une place de marché opérée par Zero Plastic Oceans. Pour son cofondateur, le Français Vincent Decap, cette technique de "cotraitement" (au charbon et au plastique) est la meilleure solution pour gérer les déchets plastiques de nombreux pays comme le Cambodge.
"Nous ne cherchons pas la perfection. Quand on vise la perfection, on ne fait rien", dit-il.
Les mesures de qualité de l'air effectuées par l'AFP et SourceMaterial autour de la cimenterie et dans un emplacement éloigné et isolé n'ont pas mis en évidence de taux plus élevés de particules fines PM2.5, qui peuvent pénétrer dans les poumons, autour de l'usine. L'emplacement éloigné avait des taux supérieurs, sans doute en raison de brûlis agricoles à proximité.
Les experts interrogés soulignent que les appareils communs ne peuvent pas détecter les substances les plus problématiques générées par la combustion du plastique.
Le ministère cambodgien de l'Environnement affirme de son côté que la combustion du plastique est régulée, contrôlée et interdite en plein air. Mais des déchets sont régulièrement brûlés en extérieur, a constaté l'AFP.
- "Dans un monde idéal..." -
Qu'en est-il de l'impact sur le climat ? La fabrication du ciment génère 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Sur le papier, remplacer le charbon par du plastique permet de réduire cette empreinte carbone.
Mais le calcul est plus complexe lorsque l'on prend en compte l'ensemble du cycle de vie du charbon et du plastique - qui est lui-même issu de la transformation d'hydrocarbures.
Incinérer le plastique ne revient pas à le recycler, explique Ed Cook, spécialiste de l'économie circulaire du plastique à l'université britannique de Leeds. "Il faut éviter et chercher des alternatives à l'incinération de combustibles fossiles, quelle que soit leur source."
Ces débats sont très théoriques pour Sebastian DiGrande, dans des pays où les déchets plastiques, autrement, sont brûlés artisanalement en extérieur.
"Dans un monde idéal, ces plastiques à usage unique n'existent pas et il n'y a pas de plastique dans l'environnement", répond-il. "En attendant, ma question reste : que voulez-vous qu'en en fasse?"
Une "fausse alternative", rétorque Neil Tangri, du centre de politiques publiques environnementales à l'université américaine de Berkeley. Lui estime qu'il ne faut pas accepter ces techniques d'incinération dans les cimenteries comme un système de gestion des déchets à part entière. Le vrai objectif, selon lui, reste de réduire la production de plastique.
Une production appelée à tripler d'ici 2060, selon l'OCDE. Alors que les négociations pour un premier traité mondial contre la pollution plastique ont échoué spectaculairement en décembre dernier.
L.Meier--VB