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Dans les forêts de l'Inde, les derniers feux d'une insurrection cinquantenaire
Lorsque les rebelles ont exécuté son père accusé d'être un traître, le jeune homme n'a pas hésité. Il a quitté l'université et rejoint les paramilitaires pour se battre contre l'insurrection maoïste qui agite le cœur de l'Inde depuis plus d'un demi-siècle.
Les insurgés "disent combattre pour nous, mais en fait ils nous tuent", dénonce cet engagé de 21 ans, qui tait son nom par crainte de représailles sur ses proches.
Comme d'autres jeunes des tribus autochtones de l'Etat de Chhattisgahr (centre), il a rallié les Gardes de la réserve de district (DRG), composées de recrues locales et de rebelles repentis encadrés par la police, pour porter un coup fatal aux Naxalites.
"Ils sont notre force de frappe", explique un policier sous couvert d'anonymat. "Mes DRG ont souffert des Naxalites", ajoute-t-il, "alors pour eux, c'est un combat personnel".
Plus de 12.000 militaires, rebelles et civils ont été tués depuis qu'en 1967 une poignée de paysans, cornaqués par des cadres maoïstes, a pris les armes contre les propriétaires fonciers féodaux du village de Naxalbari - qui a donné son nom à la rébellion -, dans le district de Darjeeling au pied de l'Himalaya.
Partie du Bengale occidental, l'insurrection s'est propagée jusqu'à un tiers du territoire indien à son apogée au début des années 2000. Les Naxalites affirment lutter pour les droits des populations tribales de l'est et du centre de l'Inde, dans un contexte de pauvreté et d'inégalités sociales sur des terres aux sous-sols riches en ressources minières.
Leur influence s'est depuis largement rétrécie et se concentre à présent dans les forêts de quelques districts de l'Etat de Chhattisgahr, plus connues sous le nom de "Corridor rouge".
Selon la police, un maximum de 1.200 insurgés y seraient encore actifs - un chiffre impossible à vérifier de façon indépendante.
- Repentis -
Il y a quelques mois, le ministre de l'Intérieur Amit Shah a lancé ses commandos à l'assaut de ce dernier bastion, en clamant son intention de les éliminer d'ici à l'année prochaine.
Une lutte à mort, dont les civils font largement les frais.
Sur les routes et autour des villages posés en lisière de la jungle du district de Bastar, les combats font rage. Depuis le début de l'année, les rebelles ont subi de lourdes pertes. Près de 400 tués, selon les forces de sécurité.
"Nous connaissons tout de ces forêts", explique Kiran, un ex-Maoïste qui a tourné le dos à la rébellion pour rejoindre les DRG. "Nous pouvons infiltrer nos forces par une route secrète et les en retirer par une autre", poursuit-il.
Dans ce dédale de chemins forestiers étroitement surveillés par les forces de sécurité, il n'a pas été possible d'entrer en contact avec des insurgés.
Ce n'est pas la première fois que le gouvernement central fait le pari d'utiliser des recrues locales pour combattre leurs frères rebelles.
En 2005, l'insurrection a atteint son pic avec la fusion de deux mouvements maoïstes.
Le Parti communiste d'Inde qui en naît proclame qu'il veut établir un "gouvernement du peuple" en "détruisant par la guerre l'appareil étatique autocratique", à savoir "l'armée, la police et la bureaucratie des classes dirigeantes réactionnaires".
L'insurrection maoïste réunit alors 15.000 à 20.000 militants armés qui mènent des opérations meurtrières contre les troupes régulières. Comme en avril 2010, quand il abattent 75 soldats indiens dans une série d'embuscades.
Dans leur "Corridor rouge", les Naxalites mettent en place une administration parallèle, des cliniques mobiles, des écoles, ils redistribuent des terres, lèvent des impôts même.
- Bavures -
Mais ils y font aussi régner la terreur en exécutant ceux qui refusent de rentrer dans le rang ou sont suspectés d'être des informateurs.
Face à ce qu'il considère comme la "plus grave menace pour la sécurité intérieure" de son pays, le Premier ministre de l'époque, Manmohan Singh, lance alors l'opération "Green Hunt".
A sa pointe, une unité paramilitaire encadrée par des Maoïstes repentis, le Salwa Judum.
Sa brutalité est restée de sinistre mémoire. La population locale lui reproche une longue série de meurtres, viols, destructions et pillages.
En 2011, la justice a fustigé le recrutement de ces jeunes motivés par "un désir de vengeance".
Les DRG reprennent la même idée. Enrôler des "locaux" contre les insurgés. Mais cette fois encadrés par des officiers de police.
La nouvelle unité, qui compte plus de 4.000 hommes selon les autorités, n'a toutefois pas tardé à être visée par les mêmes accusations que le Salwa Judum.
"Ils ont tué un homme innocent." Dans sa maison en lisière d'une forêt de tamaris, Somari Negi pleure encore la mort de son mari, abattu le 25 février 2024 par les paramilitaires.
La police affirme avoir retrouvé sur la dépouille de Rameshwar Negi, 42 ans, une arme à feu et de la littérature maoïste. La preuve, selon elle, qu'il avait rejoint l'insurrection naxalite.
"Nous n'avons pas d'arme à feu à la maison", réfute aujourd'hui sa veuve. "Il était parti en forêt avec une hache, comme il le faisait toujours."
Ce même jour de février 2024, deux autres hommes du même village de Marda ont été tués.
"J'approuve ce que fait le gouvernement" contre la rébellion, dit le frère d'une de ces deux victimes, Dinesh Teta. "Mais je trouve inacceptable qu'ils tuent des civils désarmés comme mon frère."
- "Une erreur" -
Plusieurs habitants de Marda interrogés par l'AFP le confirment. Beaucoup d'hommes et de femmes des environs ont rejoint les rangs de la guérilla. Mais certainement pas les trois tués ce matin-là.
Selon ces témoins, l'offensive en cours fait de nombreuses victimes collatérales.
Le principal parti d'opposition indien, le Congrès, dénonce régulièrement des "fausses confrontations avec les tribus locales innocentes". Il ne s'agit selon lui que d'exécutions sommaires maquillées en ripostes de légitime défense.
En mai 2024, les DRG sont ainsi accusées d'avoir exécuté 12 personnes dans le village de Pedia. "Des civils ensuite rebaptisés en insurgés", avait alors dénoncé une ONG locale, l'Union populaire pour les libertés civiles (PUCL).
"Des civils sont morts" ce jour-là à Pedia, confirme aujourd'hui sous couvert d'anonymat un membre des DRG. "C'était une erreur."
Interrogé sur ces incidents, le chef de la police du district de Bastar, P. Sundarraj, assure que ses troupes mènent leurs opérations "dans le strict respect des procédures constitutionnelles".
"Elles ne ripostent qu'en cas de légitime défense, comme c'est leur droit. Nous n'éprouvons aucun plaisir à compter des cadavres", insiste-t-il, jugeant l'action de ses hommes "exemplaire".
Tout au long de leurs déplacements dans le district, les journalistes de l'AFP ont été suivis de près par les forces de l'ordre. Et empêchés d'accéder à certaines zones bouclées par d'importants effectifs armés, officiellement pour "raison de sécurité".
Dans les villages de la région, la multiplication des combats opposant les jeunes autochtones des deux camps nourrit l'inquiétude de ceux qui redoutent un nouveau cycle de vendettas.
"Les Adivasis tuent d'autres Adivasis", résume une militante locale de défense des droits humains, Soni Sori. "Ils sont les seuls à mourir."
- Victimes autochtones -
Sous le terme d'Adivasis, la Constitution indienne de 1950 reconnaît les autochtones considérés comme les habitants originels du sous-continent. Elle leur accorde protection et aides spécifiques.
Ils seraient 84 millions en Inde, tout en bas de la hiérarchie des castes qui régit encore la société.
Selon Soni Sori, les victimes des paramilitaires sont pour l'essentiel des villageois innocents ou une piétaille d'anonymes contrainte de combattre sous la bannière maoïste par des chefs issus d'autres communautés ou de castes plus élevées.
Côté DRG, les recrues autochtones sont en première ligne, de l'aveu même de leurs membres.
"Notre camp est composé d'Adivasis, celui d'en face est composé des mêmes. Ceux qui meurent font partie de notre peuple", constate Yogesh Madhvi, un chef rebelle passé du côté de l'Etat.
Il explique que c'est pour accélérer la fin de cette guerre meurtrière qu'il a quitté l'uniforme maoïste pour endosser le treillis des paramilitaires. "J'en avais tout simplement assez de cette violence insensée", confie-t-il.
Une violence qui continue de peser sur les populations au gré des attaques des guérilleros et des opérations de nettoyage ou de sécurisation des forces de sécurité.
Dans le cadre de "l'assaut final" lancé par les autorités, des camps dits de "sécurité" ont été créés pour accueillir les villageois déplacés.
Pour le chef de la police du district de Bastar, ils participent d'une stratégie destinée à contrer l'influence maoïste en servant de "centres de développement" pour la construction de routes, de relais téléphoniques, l'ouverture de services sociaux, l'accès à l'eau courante, à l'électricité...
"Les camps nous protègent des Maoïstes qui avant nous menaçaient si on ne les aidait pas", concède sous couvert d'anonymat un des déplacés. "Mais maintenant, les forces de sécurité tuent des innocents présentés comme des rebelles..."
- Appétits miniers -
Un rapport rédigé en 2024 par un panel d'activistes et d'universitaires a décrit le district de Bastar comme "une des régions les plus militarisées", avec un policier ou militaire pour neuf civils.
Les ONG et l'opposition affirment que ce déploiement sécuritaire et les grands travaux entrepris par les autorités constituent en fait l'avant-garde d'une opération bien plus intéressée.
"L'objectif de tout ça, c'est d'ouvrir les forêts aux grandes compagnies minières", lance Soni Sori.
Le gouvernement de l'Etat de Chhattisgarh ne s'en cache plus, rappelant que le sous-sol de la région de Bastar abrite 10% des réserves confirmées de fer du pays - mais aussi du charbon, de la bauxite, des diamants ou de l'or.
Depuis 1968, les mines de Bailadila arrachent chaque année des dizaines de milliers de tonnes de minerai. Les autorités ont proposé d'étendre ses opérations à une forêt considérée comme sacrée par les populations autochtones.
Leur activité a chassé de nombreux villageois et causé de graves dommages à l'environnement, déplorent les ONG.
Et malgré la féroce opposition des habitants du secteur, la mine de Rowghat, dans la forêt de Matla, non loin de là, a commencé à opérer en 2022.
"S'il ne s'agit plus que d'exploitation minière et que des gens sont déplacés sans compensation", avertit sous couvert d'anonymat un ancien chef maoïste reconverti dans les DRG, "la population va finir par penser que les Naxalites avaient du bon".
Sûr de sa force, le gouvernement a ignoré début avril l'offre de cessez-le-feu sous condition présentée par les insurgés.
Une grave erreur, déplore l'activiste Soni Sori. "Cela risque de précipiter les populations autochtones dans les bras des Maoïstes pour sauver leur vie..."
T.Zimmermann--VB